L’amélioration du rendement de l’estérification par l’extraction de l’ester synthétisé, l’élimination de l’eau formée ou l’utilisation d’un excès de l’un des réactifs, est un exemple de déplacement d’équilibre.
Le Chatelier énonça, en 1884, les lois régissant ces déplacements.
Document
Les origines de la notion d’équilibre chimique
L’équilibre était une notion d’origine mécanique ; rien n’assurait a priori qu’elle pouvait s’appliquer au cas des réactions chimiques. [On savait qu’il existait en chimie des réactions incomplètes, dans lesquelles la transformation des corps initiaux en produits finaux s’arrêtait avant l’épuisement des corps en présence]. À titre d’exemple, citons la dissociation des sels ou encore l’éthérification, dans laquelle un alcool et un acide se transforment en éther et en eau…
Jean-Baptiste Dumas (1800-1884) observa le premier que des réactions chimiques incomplètes pouvaient résulter d’un équilibre entre des réactions chimiques inverses l’une de l’autre.
Henri Sainte-Claire Deville (1818-1881) avança l’idée que toutes les réactions chimiques pouvaient être réversibles dans des conditions bien précises de température, de pression… Il admit alors, avec Henry-Louis Le Chatelier, qu’il n’y avait pas de différence fondamentale entre les phénomènes physiques et chimiques ni entre les lois qui les régissent.
Le principe de Le Chatelier
L’analogie avec la mécanique était en fait revendiquée par Le Chatelier lui-même qui déclarait : « En chimie comme en mécanique, l’étude d’un système peut être ramenée à l’étude de l’équilibre. Tout système hors d’équilibre se déplace pour arriver à une position d’équilibre stable. Connaissant les conditions de l’équilibre, nous pouvons prévoir immédiatement le sens du déplacement d’un système quelconque. »
Après avoir précisé les facteurs de l’équilibre chimique (température, pression, concentration, force électromotrice) et éliminé les éventuelles conditions qui n’ont aucune influence (catalyseur, …), Le Chatelier proposa l’énoncé suivant, connu aujourd’hui sous le nom de Principe de Le Chatelier :
« Tout système en équilibre chimique éprouve, du fait de la variation d’un seul des facteurs de l’équilibre, une transformation dans un sens tel que, si elle se produisait seule, elle amènerait une variation de signe contraire du facteur considéré. »
Cet énoncé, complété par la remarque selon laquelle « les modifications de l’équilibre sont nulles quand elles ne peuvent pas produire d’effet analogue à celui de la cause extérieure », permet de prévoir, aujourd’hui encore, le sens d’évolution d’un système, après perturbation, dans de très nombreux cas.
Questions
- Le texte parle d’étherification ; ce terme vous paraît-il correct aujourd’hui ? Sinon, le corriger.
Solution
Le texte définit l’étherification : réaction entre un alcool et un acide se transforment en éther et en eau. C’est la définition d’une estérification si on emploie « éther » à la place d’« ester ».
- Donner un exemple de système mécanique qui mis « hors d’équilibre se déplace pour arriver à une position d’équilibre stable ».
Solution
- Une bille dans une cuvette finit toujours par s’immobiliser au fond de la cuvette.
- Un pendule simple écarté de sa position d’équilibre oscille jusqu’à s’immobiliser directement au dessous de son point d’attache.
- …
- Illustrer sur un exemple l’observation de Jean-Baptiste Dumas.
Solution
Un acide est dit faible s’il ne se dissocie pas totalement lorsqu’il réagit avec l’eau. Dans un tel cas la réaction inverse, celle de sa base conjuguée avec les ions oxonium, se déroule en même temps dans le milieu. L’état final est donc un état d’équilibre.
- Exprimer en terme d’avancement la phrase entre crochets : [On savait … en présence].
Solution
Cette phrase définit les transformations non totales ; l’état final, état d’équilibre, est atteint alors que le (ou les) réactif(s) limitant(s) n’a (n’ont) pas été épuisé(s).
- Montrer que les conséquences d’un excès d’alcool ou d’acide et l’élimination de l’ester ou de l’eau formés sont en accord avec le principe de Le Chatelier.
Solution
L’idée est de réfléchir en décomposant le processus en deux phases :
- Le mélange initial est stœchiométrique (équimolaire ici). On laisse le système atteindre un équilibre.
- On ajoute la quantité de réactif en excès manquante. Et on applique le principe afin de déterminer dans quel sens le système évolue.
Pour l’estérification, un premier état d’équilibre ayant été atteint, $$ K = Q_{r,eq} \dfrac{[\text{ester}]_{eq}\, [\text{eau}]_{eq}}{[\text{acide}]_{eq}\, [\text{alcool}]_{eq}} = \dfrac{n_{eq}(\text{ester})\, n_{eq}(\text{eau})}{n_{eq}(\text{acide})\, n_{eq}(\text{alcool})} $$ Si on augmente $n(\text{acide})$, la nouvelle valeur du quotient de réaction est telle que $Q_r < K$. Le critère d’évolution précise que le système doit évoluer dans le sens direct de façon à ce que l’on ait à nouveau $Q_r = K$ ; il consomme donc l’acide.
- Quel est l’effet d’une réaction athermique sur la température du système où elle se déroule ? En déduire que la remarque selon laquelle « les modifications … cause extérieure » permet de justifier que la limite de l’estérification est indépendante de la température.
Solution
Une réaction chimique athermique ne libère aucune énergie sous forme thermique. La température du milieu reste donc constante, comme la valeur de la constante d’équilibre. La composition de l’état d’équilibre lors d’une estérification est indépendante de la température.